« Changer la gouvernance » ! L’expression revient de façon récurrente dans les discours et les publications depuis quelques mois pour parler de l’après-crise. En jeu : la nécessité de tirer les enseignements des erreurs du passé et des défauts de régulation. Je martèle pour ma part que l’absence de contre-pouvoirs a conduit à aux crises que nous vivons. Des crises imbriquées : financière, économique, sociale, sociétale. Changer la gouvernance… Comment ne pas souscrire à cet objectif, certes, mais comment y parvenir concrètement ?
Si la qualité d’un modèle de gouvernance s’évalue à l’aune de l’équilibre des pouvoirs, de la complémentarité des compétences, des expertises et de la diversité des acteurs, alors la marge de progrès dans les conseils d’administration (CA) des entreprises du CAC 40 ou du SBF 120 est… con-si-dé-rable.
La cooptation organisée conduisant à la consanguinité des membres des CA peut engendrer bien des malformations. Attention, danger ! Il faut de la diversité, de la pluridisciplinarité. Bref, des contre-pouvoirs organisés et professionnalisés. En ce sens, la CFDT Cadres appuie tout contrat d’objectif pour favoriser l’accès des femmes aux postes de gouvernance.
A l’heure où démarre en France une négociation sociale sur le paritarisme, ce singulier modèle de gouvernance conduisant à partager le pouvoir de gestion - voire de négociation à parité entre les représentants des salariés et ceux des employeurs - il me semble que les acteurs économiques et sociaux seraient bien inspirés de dresser un bilan de ce modèle pour repenser plus globalement la gouvernance des entreprises. Plus qu’un choix de gestion, il s’agit bien avant tout d’un choix politique, qui doit satisfaire les exigences énoncées plus haut.
L’expression dans Le Monde d’hier de M. Stéphane Richard à France Telecom qui interpelle l’adaptation de la forme de gouvernance du groupe aux chantiers qui l’attendent et préconise la séparation des fonctions du président de celle de directeur général, pose encore une fois la question des principes de bonne gouvernance.
Une bonne gouvernance organise à la base la confrontation démocratique avec des parties prenantes aux intérêts divergents. Comment des dirigeants si constitués peuvent -ils arbitrer les intérêts divergentes des parties prenantes si ils partagent tous imbrications les mêmes intérêts ? Quel est l’espace où la confrontation des logiques et d’intérêts différents est pris en compte ? Les nominations croisées illustrent la concentration des pouvoirs au cœur de la gouvernance de grands groupes et l’exemple de M. Proglio qui arrive à cumuler la fonction de PDG de deux sociétés qui plus est concurrentes, montre le paroxysme de l’exercice. Alors l’entreprise devient l’espace le moins démocratique de notre société et l’entrepreneur même génial qui décide seul prendra un jour une mauvaise décision : toute l’histoire du capitalisme est là pour le démontrer.
La distinction des fonctions entre président et directeur général est vertueuse si elle s’accompagne de cet incontournable exercice démocratique dans un espace pluriel.
Rédigé par : FSM | mardi 26 janvier 2010 à 14h20