Même le « gendarme » de la Bourse, Jean-Pierre Jouyet, président de l’Autorité des marchés financiers, chargée entre autres du suivi de l’application des codes de gouvernement d’entreprise ne cache plus son agacement. « Ces codes visiblement ne suffisent plus » livre t-il dans Les Echos du 29 janvier dernier, en faisant référence au code Afep – Medef sur les rémunérations des dirigeants d’entreprises (cotées en Bourse) et la gouvernance. Le débat « contraignant – non contraignant, loi ou pas loi, réglementation, norme ou code de bonne conduite » n’a pas fini de faire couler de l’encre. Force est de constater que lorsque le patronat a demandé du non-contraignant, les faits ont largement démontré sa capacité à exercer son droit de grève. Lorsque cela est devenu trop voyant, il lui a fallu trouver un autre subterfuge, la démonstration par l’image positive et l’affichage d’un code de bonne conduite et de patrons enfin responsables.
Comme le souligne régulièrement la CFDT Cadres, la responsabilité n’est pas un objet d’image mais un principe d’action. Et quand l’action ne suit pas les bonnes intentions, la tentation est grande pour les pouvoirs publics, voire pour les autorités de régulation, de revenir à la loi, au cadre législatif ou règlementaire contraignant, alors qu’il semblerait qu’une voie médiane pourrait être trouvée entre la règlementation à tout prix et la dérégulation totale : celle d’une régulation constructive, objective et cordonnée avec l’ensemble des parties prenantes, et notamment des entreprises.
Et si le contrat d’engagements négocié constituait la voie à privilégier pour produire des résultats concrets ? Dés 2004, dans un article intitulé « Des exigences éthiques aux engagements contractuels » publié pour la revue Entreprise éthique, je soulignais la responsabilité qui est la nôtre :
« … Pour l’organisation syndicale que nous sommes, soucieuse de faire progresser les pratiques socialement responsables dans les entreprises, la responsabilité sociétale de celles-ci vis à vis de leur environnement, nous souhaitons privilégier la voie de la négociation collective et la contractualisation d’engagements réciproques, la seule qui puisse autoriser et surtout organiser le nécessaire contrôle des engagements pris de part et d’autre, par les parties prenantes intéressées…. Contrôle interne ou contrôle externe suivant les parties en présence et la nature même des engagements, dans les deux cas, ce n’est plus l’individu qui est en première ligne mais les collectifs concernés, les représentants des parties prenantes. Cette démarche engage la responsabilité des parties signataires des engagements et est de fait beaucoup plus exigeante…. La démarche de contractualisation, outre ses vertus pédagogiques d’appropriation par les acteurs et d’instauration d’un véritable dialogue a le mérite de prévoir la nature des engagements des parties et les modalités de contrôle de ces engagements… ». (1)
Des exigences éthiques aux engagements contractuels, il y a effectivement un pas important à franchir, pour passer de la figure du héros au processus collectivement négocié de construction des contre-pouvoirs. Créer les conditions pour ce faire, c’est bien aussi là que l’on attend l’autorité politique.
(1) JP Bouchet, Des exigences éthiques aux engagements contractuels entre parties prenantes, Entreprise Éthique, Dossier n°21 octobre 2004 Comment réussir vos partenariats éthiques ?
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